Marque employeur, storytelling RH, attractivité... Ces mots circulent beaucoup, mais sont-ils vraiment adaptés à la fonction publique ? Dans cet épisode, Sigrid Berger propose une lecture bien plus fine et utile : celle de l'identité employeur. Une approche réaliste, ancrée dans le quotidien des collectivités et des agents.
Ce sujet est capital dans un contexte de tensions sur le recrutement, de perte de sens et de désengagement. Poser les bases d’une identité employeur sincère, c’est offrir aux agents une boussole et aux candidats un cap. Bref, un levier stratégique pour les RH publiques.
« on ne crée pas une marque employeur, on la développe. »
Sigrid Berger est administratrice territoriale et fondatrice de la plateforme Profil Public, lancée en octobre 2018. Diplômée de Sciences Po Paris et de l'Institut national des études territoriales (INET), elle a travaillé pendant cinq ans à la Région Hauts-de-France, puis à la Direction générale de Pôle emploi .
Son objectif avec Profil Public est de moderniser le recrutement dans le secteur public en valorisant l'identité employeur des institutions .
La “marque employeur” est devenue un passage obligé des discours RH. Mais dans le service public, ce concept venu du privé montre vite ses limites. La marque suppose de séduire un “client”, de construire un récit attractif, souvent déconnecté du vécu réel des agents. Cette logique commerciale ne colle pas à la mission de service public, fondée sur le collectif, la continuité et la transparence.
Réduire l’attractivité d’un employeur public à une stratégie de communication revient à ignorer ce qui fait sa spécificité : la vocation, la stabilité, la contribution à l’intérêt général. Ce n’est pas une “image” qu’il faut polir, mais une réalité vécue à valoriser. Le secteur public n’a pas besoin d’une marque, mais d’un récit sincère sur ce qu’il est et sur ce qu’il offre réellement à celles et ceux qui y travaillent.
Parler d’identité employeur change la perspective. Il ne s’agit plus de vendre, mais de se définir. Une identité employeur crédible repose sur des fondations concrètes : des valeurs incarnées, une vision claire du travail public, une culture managériale alignée avec les besoins des agents.
Cette identité se nourrit du quotidien : conditions de travail, modes de collaboration, attention portée aux parcours, reconnaissance, équilibre entre engagement et vie personnelle. Elle se construit d’abord de l’intérieur, dans les pratiques RH et managériales, avant de se diffuser à l’extérieur.
Une collectivité, une administration, une université ou un hôpital peuvent alors affirmer une personnalité propre, ancrée dans leur mission et leur territoire. L’identité employeur devient ainsi un levier de cohérence : elle relie la promesse faite aux candidats à la réalité vécue par les agents.
L’identité employeur ne se décrète pas, elle se vit au quotidien — et ce sont les managers qui en sont les premiers vecteurs. Leur rôle est central : ils traduisent les valeurs de l’organisation dans les gestes du management, les échanges, les décisions.
Un discours RH, aussi travaillé soit-il, reste creux si le management ne le relaie pas dans la pratique. C’est au niveau des équipes que l’identité employeur prend corps : dans la qualité des relations, la clarté des objectifs, la possibilité d’expérimenter ou de progresser.
Pour qu’elle soit crédible, cette identité doit donc être co-construite avec les managers, en intégrant leur expérience et leurs contraintes. En retour, cela redonne du sens à leur mission : faire grandir leurs équipes, pas seulement atteindre des objectifs.
L’identité employeur, quand elle est incarnée, devient un outil de fidélisation autant qu’un moteur d’engagement collectif.