Concours : Comprendre les attentes d'un jury

Dans cet épisode, je reçois Sonnya Garcia — DGS d’une commune de Haute-Savoie, coach en leadership et formatrice habituée des concours de la fonction publique — pour adopter un point de vue rarement mis en lumière : quelles sont, vraiment, les attentes d’un jury lors d’un concours ? Nous déconstruisons ensemble les idées reçues, explorons ce que les jurys cherchent chez un candidat, et clarifions comment préparer l’épreuve orale — non pas comme un concours scolaire, mais comme une admission à un métier de terrain. Cet épisode s’adresse à tous les agents — futurs ou actuels — qui souhaitent valoriser leur expérience, structurer leur discours et s’inscrire dans une démarche de professionnalisation consciente.

Présentation de l'invitée : Sonnya Garcia

"Le jury ne cherche pas des clones — il cherche des personnes capables d’endosser une responsabilité, pas des versions figées d’un manuel."

Sonnya Garcia cumule plusieurs casquettes : depuis 2023, elle est Directrice générale des services dans une collectivité d’environ 10 000 habitants, 139 agents. Elle est également coach certifiée, formatrice pour la préparation aux concours de la fonction publique, et blogueuse active sur les enjeux de management, d’équilibre vie pro-vie perso et de leadership public.

Son parcours combine l’expertise institutionnelle d’un DGS, le regard formateur d’une coach, et l’expérience concrète de terrain. Elle incarne un profil rare : à la fois décideuse, accompagnatrice, et pédagogue — un mélange particulièrement adapté pour éclairer ce que recherche un jury et ce qu’attend un agent susceptible de réussir un concours.

Décryptage des idées clés

Le jury cherche des professionnels lucides, pas des candidats parfaits

Ce que l’on oublie souvent, c’est qu’un jury de concours n’évalue pas seulement des réponses. Il évalue une personne qui va intégrer une organisation, rejoindre une équipe, représenter une mission. Un bon candidat n’est pas celui qui récite un cours ou qui déroule un plan appris par cœur, mais celui qui montre une forme de maturité professionnelle. Cela passe par la capacité à comprendre le métier tel qu’il est vraiment — avec ses zones d’incertitude, ses tensions, ses responsabilités. Le jury veut sentir que le candidat a une vision concrète : pourquoi ce poste, pourquoi maintenant, ce qu’il a déjà appris du terrain, ce qu’il devra encore apprendre. Il ne s’agit pas de briller intellectuellement mais d’être crédible humainement.
Un bon oral, c’est un oral incarné. Un candidat qui comprend déjà qu’être agent public signifie naviguer entre règles et réalités, prendre des décisions imparfaites, expliquer, écouter, ajuster. Le jury repère ceux qui ont déjà commencé ce travail intérieur : se situer, se connaître, savoir ce qu’on apporte et ce qu’on doit encore renforcer. Le concours n’est pas une sélection académique : c’est une rencontre avec un métier.

L’oral n’est pas une performance : c’est une relation de travail en miniature

Lorsqu’un jury interroge un candidat, il ne cherche pas un numéro parfaitement exécuté. Il cherche à savoir comment cette personne réagirait demain, face à un élu, un collègue, un usager, un conflit, une urgence. L’oral est un espace d’observation : posture, calme, écoute, capacité à reformuler, manière d’argumenter, aptitude à dire “je ne sais pas”. Autrement dit, des compétences professionnelles, pas universitaires.
Beaucoup d’échecs viennent de cette confusion. Les candidats surjouent, récitent, se figent. Ils veulent prouver, impressionner, cocher toutes les cases. Or, un jury n’attend pas un surhomme : il attend un futur pair. Quelqu’un avec qui il pourrait travailler. Quelqu’un qui sait raisonner, prendre du recul, demander une précision, reconnaître une limite, assumer une décision.
Et surtout : quelqu’un d’authentique. La posture qui rassure un jury n’est pas la perfection, mais la cohérence. Être soi, mais un soi professionnel. Être sincère sans être brut. Être préparé sans être mécanique. Le jury teste moins les connaissances que la manière d’être. L’oral n’est pas un examen : c’est une projection dans la vie réelle du métier.

Se présenter, c’est apprendre à reconnaître ce que l’on vaut — et le montrer clairement

Beaucoup de candidats peinent à parler d’eux. Ils minimisent leurs réussites, s’excusent presque d’avoir un parcours, et pensent que la compétence “parle d’elle-même”. Mais dans un oral, rien ne parle tout seul. Un jury n’est pas dans votre tête : il ne voit que ce que vous lui donnez. Apprendre à “se présenter” n’est pas de l’autopromotion : c’est un acte de lucidité. C’est accepter de regarder son parcours avec sérieux : ce que j’ai appris, ce que j’ai surmonté, ce que j’ai construit, ce que je sais faire et ce que je veux encore développer.

Sonnya Garcia le montre très bien dans ton échange : réussir un concours, c’est réussir à mettre des mots sur son expérience. Ce n’est pas enjoliver, mais éclairer. Ce n’est pas se vanter, mais se situer. Le jury attend quelqu’un capable d’analyser son propre chemin, parce que cette capacité dit beaucoup sur la manière dont cette personne analysera les situations professionnelles.

Savoir se raconter, c’est aussi savoir où l’on va. Cela donne une colonne vertébrale à l’entretien : un fil, une cohérence, un sens. Assumer sa valeur, ce n’est pas un ego-trip : c’est la première compétence d’un agent qui va représenter une mission.

Fonction Publique Mon Amour est un média indépendant créé par Linda Comito.
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